14 janv. 2018

"Histoire de la Violence" - Edouard Louis

Chez : Le Seuil (2016) 
Genre : Contemporain ; Témoignage romancé 
Selon nous : A partir de 16 ans

Résumé : "J'ai rencontré Reda le soir de Noël 2012, alors que je rentrais chez moi après un repas avec des amis, vers quatre heures du matin. Il m'a abordé dans la rue et j'ai fini par lui proposer de monter dans mon studio. Ensuite, il m'a raconté l'histoire de son enfance et celle de l'arrivée de son père en France, son père qui avait fui l'Algérie. Vers six heures du matin, il a pris plusieurs de mes affaires, il a sorti un revolver et il a dit qu'il allait me tuer. Il m'a insulté, frappé, violé. Le lendemain les démarches médicales, policières et judiciaires ont commencé, qui, plus qu'elles ne réparent la violence, la prolongent et l'aggravent."
















Anaëlle : ★★★★☆
Ce roman est le deuxième de l'écrivain Edouard Louis. J'ai lu le premier En finir avec Eddy Bellegueule il y a quelques années, et j'avais été profondément marquée par son écriture, et son récit. C'était un roman brutal, objet de nombreuses polémiques à l'époque.

Ce roman ne fait pas exception. Ici, Edouard Louis raconte une nuit de drame, partagée entre moments de tendresse, et moments d'horreur. Il retrace l'histoire de cette nuit de Noël, où il fut agressé, violé, dans son propre appartement, ainsi que les jours pénibles qui suivirent. L'auteur aborde ces thématiques pénibles à travers une construction originale, et puissante : l'histoire est racontée par sa sœur, tandis que le personnage d'Edouard Louis l'écoute raconter les faits à son mari, caché derrière une porte. Son récit est ponctué par les interventions d'Edouard Louis lui-même.

Je peux sans aucun doute dire que j'ai aimé ce livre à bien des égards.
Si le livre semble être écrit comme une tentative de résilience, Edouard Louis propose une véritable analyse des événements, de l'agression, et de son traumatisme, et pose un regard à la fois lucide et personnel.

La combinaison des récits du narrateur et de sa sœur offre différents points de vue sur ce qui s'est passé, et cela nous permet de relativiser nous-même le récit. Les deux narrateurs se contredisent parfois l'un l'autre, et cela nous rappelle que la parole de l'un comme de l'autre est subjective, et qu'il n'y a pas de vérité absolue. Leur enfance est évoquée, ainsi que celle de l'agresseur d'Edouard Louis.

L'auteur tente de proposer une explication à cette violence, en cherchant des réponses dans le parcours de son agresseur. Il aborde les thématiques de l'émigration, du racisme, ou encore de la misère. Dans son premier roman, déjà, on trouvait l'aspect sociologique de son analyse, que j'ai retrouvé avec plaisir ici.

Certains ont été gênés par l'aspect nombriliste du récit, tant sur le fond que sur la forme. On a beaucoup reproché à Edouard Louis de se "regarder écrire", de "s'écouter parler". J'admets volontiers que le narrateur/auteur peut parfois sembler égocentrique, ou ingrat, mais cela ne m'a pas dérangé pour plusieurs raisons. D'une part, je considère que l'auteur/narrateur est un être humain, et qu'au vu du caractère autobiographique du roman, c'est à nous de relativiser ses propos, et de ne pas se fier aveuglément à un narrateur subjectif, notamment lorsqu'il parle de sa famille. Il est également plutôt cohérent d'imaginer que comme chacun, il a ses défauts.

Pour résumer, ce roman m'a énormément touché. J'ai été très admirative de sa capacité à prendre du recul sur les événements, et j'ai été totalement happée par son écriture, toujours aussi parlante, et poignante.

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